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Calculette
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Article de presse Les mécanismes des crises: comprendre leurs commencements, leurs déroulements et leurs résolutions.

Jeu 2 Jan - 16:52

Les mécanismes des crises: comprendre leurs commencements, leurs déroulements et leurs résolutions.


Depuis 2008, la crise a lourdement atteint les économies et entraîné de graves destructions tant en capital financier et humain que matériel. Les mécanismes de la formation d’une crise sont souvent très complexes et ceux pour en sortir le sont tout autant, si ce n’est parfois plus.
Cinq ans après le début de la crise dite des « subprimes », de nombreuses organisations (FMI, OCDE, Banque Mondiale, Commission européenne…) observent une reprise partielle de l’économie. Il semblerait que la crise en zone euro s’estompe tandis que les Etats-Unis affichent un bon redémarrage de leur économie domestique. Les pays émergent montrent quant à eux des signes avant-coureurs de crises des balances courantes et monétaires (notamment le Brésil et l’Inde). Dans ce climat de reprise économique mondiale, certains économistes (comme Patrick Artus et Jacques Sapir) rappellent que la croissance reste très faible et que les perspectives d’une forte amélioration de celle-ci sont encore très éloignées, notamment en zone euro.
Il est donc utile de s’intéresser aux mécanismes de la formation d’une crise car en comprendre les spécificités nous permettraient de déterminer de meilleures politiques économiques pour en sortir.

Retour en arrière. Que dit la théorie ?

Au XIX siècle, un économiste français établit une loi qui porte son nom et qui fait encore débat aujourd’hui : la « loi des débouchés, » ou « loi de Say. » Pour l’économiste classique Jean-Baptiste Say, « il est bon de remarquer qu’un produit créé l’offre, […] le fait seul de la formation d’un produit ouvre, dès l’instant même, un débouché à un autre produit » (Say, 1817). La loi des débouchés exprime de manière globale que toute offre crée sa propre demande (formulation de Keynes). Cependant, Say n’exclut absolument pas de son raisonnement que certaines entreprises aient du mal à écouler leurs marchandises. En fait, ponctuellement, il peut y avoir des problèmes de débouchés. L’important est qu’à tout moment l’offre globale soit égale à la demande globale car c’est de cette dernière que découle la première.
Keynes fut l’un des plus virulents critiques de cette loi avec Ricardo et Marx. D’après l’économiste britannique, autant les néo-classique que Jean-Baptiste Say se trompent dans l’interprétation de l’équation de base en économie (1). Si elle est lue de gauche à droite (vision néo-classique) toute offre créé sa propre demande. Keynes en revanche lit l’équation en sens inverse, soit de la droite vers la gauche (C + I = Y). Dans ce cas de figure, c’est la demande qui crée l’offre.
Cette divergence d’opinion pourrait sembler superficielle. Elle est au contraire essentielle, notamment pour comprendre le choix effectué parmi les différentes politiques de sortie de crise disponibles. L’enjeu est de savoir si l’Etat doit plutôt soutenir l’offre, ou porter ses efforts sur les déterminants de la demande (bien que ses deux politiques ne soient pas incompatibles si elles sont effectuées de concert).

(1) Cette équation comptable est la suivante : Y = C + I (où C désigne le niveau de la consommation, I représente l’investissement et Y la production).

Entre offre et demande, que privilégier ?

Avant d’effectuer ce choix, il faut d’abord comprendre les mécanismes de formation des crises. Toutes les crises ne se ressemblent peut-être pas, mais certaines requièrent une réponse similaire de la part des pouvoirs publics pour recouvrer le chemin de la croissance.
On peut énumérer différents types de crises : crise financière, bancaire, boursière, d’offre, de demande, monétaire, de dette souveraine, des balances courantes, etc. Toutes influencent les variables économique de façon différente mais souvent (pas toujours), elles ont toutes le même point de départ : l’excès de confiance des agents économiques. De la Tulipomanie, aux frères Heinze (1907), en passant par la crise de 1929 ou celle des pays émergent de 1997 et jusqu’à la crise des « subprimes, » toutes naissent des déséquilibres économiques.
Si l’on s’intéresse tout particulièrement au cas de la crise des « subprimes, » on constate qu’elle suit un schéma presque similaire en tout point à celui de la crise de 1929 (cf. schéma ci-dessous avec un point de détail non négligeable : au cours de la Grande Dépression, la boucle orange était bien plus importante qu’elle ne l’est à l’heure actuelle). On s’aperçoit que la crise provoque une réaction en chaîne, une boucle sans fin, dont le caractère récessif représente un réel danger pour l’économie.
Pourtant, s’il est relativement facile de diagnostiquer une crise lorsque celle-ci s’est déclenchée, trouver les bons leviers pour en arrêter les effets et relancer la croissance est une tâche bien plus ardue.
Les politiques de réponse à la crise

La question est maintenant de savoir qu’elles sont les bonnes politiques à mettre en place pour relancer la croissance en Europe. Le cas des Etats-Unis et du Japon ne seront pas traités car certains aspects de leur économie diffèrent de ceux du vieux continent.
Tout d’abord, il est nécessaire de préciser dans quel type de crise nous nous trouvons. En Europe, la situation est très complexe. Globalement les salaires n’ont pas baissé mais les licenciements – et la hausse du taux de chômage qui en a découlé – ont fait diminuer la consommation des ménages, signe d’une crise de la demande. De plus, le difficile accès au crédit a provoqué un fort recul de l’activité des entreprises. Cela confirme le choc de demande. D’autres points pourraient être étudiés en vue d’affiner notre analyse, mais il est généralement reconnu que la crise actuelle est une crise de demande.
L’Europe a donc mis en place toute une série de mesures pouvant être rapprochées à la théorie néo-classique basée sur l’équivalence ricardienne (mise en lumière par Robert Barro). Cependant, au lieu de faire des politiques de rigueur via la baisse des dépenses publiques, certains Etat, comme la France, ont choisi d’augmenter les impôts. Du point de vue des néo-classiques, ce choix est catastrophique car il rend les politiques d’austérité contre-productives. D’ailleurs, l’économiste italien Alberto Alesina a publié une étude dans le national Bureau of Economic Research (NBER) à ce sujet. Celui-ci parvient à démontrer que les hausses d’impôts, utilisées comme instrument de sortie de crise, entrainent « des récessions profondes et durable, » alors que des politiques de baisses des dépenses publiques atténuent les effets récessifs.
Ces conclusions ne sont pourtant pas restées incontestées très longtemps. En effet, après avoir analysé les différents plans de rigueur mis en place depuis 2009, les économistes Nicoletta Batini, Giovanni Callegari et Giovanni Melina obtiennent des résultats à l’opposé de ceux d’Alesina. Ceci démontre, une nouvelle fois, qu’il est difficile de trouver des solutions aux problèmes économiques.

(1) Les politiques d’expansion monétaire, une politique d’offre

Le soutien apporté par les banques centrales aux secteurs bancaire et financier mais également aux Etats (via le système de rachat des titres de dette souveraine sur les marchés secondaires) a permis d’estomper les effets de la crise. Cependant, les injections de liquidités utilisées, à forte dose, par la Federal Reserve (Fed), la banque centrale japonaise (BoJ), la banque centrale d’Angleterre (BoE) et la banque centrale européenne (BCE) – via ses mesures de LTRO (long-term refinancing operation) – ne parviennent pas, aujourd’hui, à ramener les économies vers la croissance. En effet, la BCE avait principalement mis en place ces mesures accommodantes pour éviter la paralysie du système bancaire et empêcher le credit crunch (panne du crédit). Sur ce dernier point, et malgré les quelques 1 000 milliards d’euros insufflés dans le secteur bancaire, l’expansion du crédit bancaire reste faible. L’offre et la demande de crédit n’ont fait que baisser ou stagner.

(2) Les politiques keynésiennes de l’emploi

En période de récession, l’Etat se doit de soutenir l’emploi et le pouvoir d’achat des ménages. Pour Keynes, le chômage est le fléau des économies en crises car il diminue la capacité des ménages à consommer. L’Etat doit alors remédier à ce manque d’emplois privés par la création d’emplois publics (c’est de là que vient l’idée des Grands Travaux pendant lesquels l’Etat passe commandes aux entreprises pour réaliser des projets d’investissement). La demande étatique rempli les carnets de commandes et fait augmenter la production des entreprises. Ainsi le cercle vertueux de la croissance est réenclenché. D’autres mesures peuvent être mises en place telles que des aides à la recherche d’emploi, la hausse des cotisations pour le chômage, une prime à l’embauche pour les entreprises, la baisse temporaire des charges patronales, etc. Ces dernières propositions sont plus tournées vers des politiques d’offre. On favorise l’embauche et le retour à l’emploi pour relancer la production.

(3)  La gestion du budget de l’Etat

Situées au croisement des doctrines libérales et keynésiennes, les politiques d’austérité proposent de passer soit par la hausse du taux d’imposition, soit par la baisse des dépenses publiques pour sortir de la crise.  Cependant, depuis le mea culpa du FMI (et de son économiste en chef Olivier Blanchard) quant à ses prises de position sur l’impact des politiques de rigueurs sur la croissance, les keynésiens semblent avoir gagné une importante bataille idéologique.
Maintenant, si l’objectif des Etats est bel et bien de relancer la croissance, les Etats devraient mettre en place des politiques de relances comme celles initiées en 2008 et 2009. Il faudrait aussi stopper les hausses des impôts et permettre aux entreprises d’avoir une vision de long terme. Il faut cependant trouver le bon dosage car l’impact sur les déficits publics et donc sur la dette sera important.

Conclusion

De nombreuses politiques ont été instaurées en réponse à la crise et toutes n’ont pas eu les mêmes résultats. L’Europe a appliqué des politiques d’offre et de demande dont les effets mettront davantage de temps avant de pouvoir influencer l’économie réelle. Contraints de mettre en place des politiques structurelles aux coûts sociaux parfois très important (peut être trop?), celles-ci n’aboutiront peut être pas si elles ne sont pas couplées à des politiques économiques efficaces. Seul le temps nous dira si les politiques monétaires et keynésiennes des Etats-Unis et du Japon auront été plus efficaces que les politiques d’austérité européennes. Il est même un peu paradoxal de noter que les Etats-Unis, malgré leur réputation de pays ultra libéral, ont donné à l’Europe une leçon de keynésianisme alors que celle-ci mettait en place des politiques libérales de rigueur parfois brutales.

Sources :

   Alesina, Alberto F. (2011). Fiscal Policy after the Financial Crisis, NBER.
   Bouthevillain, C., Dufrénot, G., Frouté, P., et Paul, L. (2013). Les politiques budgétaires dans la crise, comprendre les enjeux actuels et les défis futurs, De Boek.
   Flash éco Natixis : « Les effets destructeurs qui apparaissent quand une récession est longue»
   Flash éco Natixis : « Politique monétaire pour soutenir l’activité : depuis 20 ans, la surenchère »
   Flash éco Natixis : « Si on croit que la progression des crédits bancaires aux entreprises de la zone euro va être durablement lente, que faut-il faire ? »
   Flash éco Natixis : « Que penser de la demande de réformes structurelle ».
   Keynes, John Maynard (1936). Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie, Payot.
   Say, Jean Baptiste (1817). Traité d’économie politique, 3è édition, livre I, chapitre 15.
   Sowell, Thomas (1972). La loi de Say, une analyse historique, Liberalia économie et liberté.

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